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  le blog anthologie

• Fabre G., Sylvie

3 Mars 2008 , Rédigé par gentle13 Publié dans #anthologie

Bonjour à vous toutes et tous, une petite nouvelle que je viens de découvrir et, qui je pense mérite votre attention, à vous de vous faire votre propre opinion. Je vous rappelle que j'ai mis en place sur ce site là un forum de discussion si vous êtes intérressé on peut discuter des choix des livres et des poèmes. En fait de la poésie et de la littérature en générale.
Mes amitiés




L'auteur

Sylvie Fabre G. née à Grenoble en 1951. Professeur de lettres.
Ses premiers textes paraissent dans la revue Sorcières, véritable aventure littéraire et féministe, à laquelle elle participe jusqu’en 1982.
Une rencontre décisive a lieu avec les Editions Unes et Jean-Pierre Sintive qui accueille ses premiers textes. Elle a depuis publié une dizaine de recueils et aussi écrit pour les éditions du Félin une prose sur l’esprit des lieux en Isère, sorte de géographie intime, rêverie autour du paysage et des êtres. Elle a collaboré depuis 1977 à une trentaine de revues et d’anthologies en France, en Belgique, en Espagne, en Grèce et au Québec. Elle aime travailler avec des artistes et a réalisé de nombreux livres avec peintres et photographes. Après une première bourse obtenue en 1997, le CNL vient de lui accorder une nouvelle bourse de création

Le Génie des rencontres
Sylvie Fabre G.

acliquez ici pour voir en grand

Il y a des soirs propices à la rencontre, des soirs si doux, tissés dans la lumière qui s’effrange sur la montagne. Le ciel, ces soirs-là, laisse tomber sa fine étoffe. Elle s’enroule sur elle-même pour découvrir les portes d’un Désert. Celui-ci a un nom enraciné dans le végétal, le minéral et l’humain. Le monde l’oublie, mais le monde en Chartreuse est ailleurs.
Un homme y vit, au pied des grandes falaises où s’échouent les nuages, dans la traverse des âges et des vents. Il a choisi de dissoudre le mouvement immuable du temps et de changer la consistance de l’espace en faisant de leur route sans halte une éternité gravée de signes.
La première parole que j’entendis sur son étrange projet m’arriva portée par l’indéchiffrable douceur d’un de ces soirs, en mars. Nous étions trois avec lui dans son atelier. Deux femmes, et un enfant ouvrant des yeux qui s’étoilaient aux traits et boucles de l’inconnu. L’homme parlait de la mémoire des langues. De cette ligne d’écriture qui coupe les terres et les siècles, tous les signes et leur musique, pour arriver jusqu’à nous. Il racontait comment, d’instinct, sa main avait parfaitement maîtrisé la calligraphie. Son enfance s’était passée à recopier les lettres des divers alphabets, et il avait ainsi acquis la puissance créatrice de chaque langue, pénétrant son essence par le geste. Il s’était exercé avec patience à ressembler au scribe plus profond que le ciel et la terre dont parle Champollion.

Quelque chose, quelqu’un
Sylvie Fabre G.
cliquez ici pour voir en grand

Tu vois à la fenêtre les colombes, leur vol lent, mouvement aussi léger que celui de ton ongle sur la vitre givrée. Janvier bat son pouls glacé aux carreaux.

Tu as les doigts gourds des petits matins. Tes mains sont chargées de mots ramassés le long des chemins la nuit. Mots égarés de l’insomnie. Quelqu’un s’est couché dans ton sommeil. Sa misère agrandit la tienne. Deux corps étendus l’un sur l’autre, noir sur noir.

Ils ont dérivé sur la banquise. Le ciel a viré. Maintenant les flocons gardent une limpidité vide. Un volcan couve derrière le givre, l’hiver fond à ta fenêtre. Le bruit des sanglots ressemble à celui de ton ongle, il déchire la vitre.

Quelqu’un pleure, tu ne sais pas si c’est toi.

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