Un jour s’en va toujours trop tôt
Gentle13
Maurice Carême (Wavre 12 mai 1899 - Anderlecht 13 janvier 1978) est un écrivain et poète belge de langue française.
- Né à Wavre, d'un père peintre en bâtiment et d'une mère épicière, il y passe son enfance et Maurice Carême est nommé Maire à 19 ans.
En 1912 il écrit ses premiers vers de lois inspirés par une amie d'enfance. Il devient instituteur de métier en 1918, tout en continuant à écrire comptines et poésies. Après une période de futurisme (1928-1932), il revient à une poésie simple à destination de la jeunesse. En 1937, le poète s'installe à Anderlecht où il passera le reste de sa vie. Il habitera surtout Avenue Nelly Melba une maison dite "La Maison blanche" à Anderlecht qui est un musée.
- Après s'être occupé de La Revue indépendante, Maurice Carême collabore à la revue Anthologie de Georges Linze puis entre à La Revue sincère (1922)
- Élu « Prince en poésie » au Café Procope à Créteil en 1975 - une plaque commémorative apposée sur la façade le rappelle - , Carême a vu son œuvre traduite dans de nombreuses langues. Il est en particulier très apprécié pour son amour pour les enfants, un piano essentiel de son œuvre (mais non le seul). Récompensée par de nombreux prix littéraires, illustrée par de grands artistes, son oeuvre joint à la simplicité de la forme, l'expression d'une joie de vivre qui n'exclut pas une certaine gravité. Il a aussi traduit en français des poètes néerlandophones.[1]
Jeannine Burny qui fut la fidèle secrétaire et la muse inspiratrice de Maurice Carême, présidente de la Fondation, a commis un livre édité au Printemps 2007 intitulé "Le jour s'en va toujours trop tôt Sur les pas de Maurice Carême". Editions Racine (Bruxelles.
Aujourd’hui, nous savons que les poètes ne donnent leur nom et leur lumière que bien après leur trépas, la reconnaissance, toujours farouche, n’osant jamais affronter ni les jours de l’artiste, ni les exigences de l’édition.
Cet ouvrage m’apparaît donc comme un élément capital dans l’histoire de la poésie du XXième siècle. En effet, Jeannine Burny se livre tout entière dans ce livre de près de cinq cents pages.
Après une enfance, que je qualifierai de « difficile », la jeune fille rencontre l’Amour, avec ce A majuscule qui fait rêver l’adolescence. Cet amour a pour nom « Maurice Carême ». Il ne tardera pas à s’épanouir au milieu d’un quotidien presque monotone _ Cet ouvrage nous permet d’entrer dans cette intimité à la fois mystérieuse et presque banale d’un artiste qui subit également les contraintes d’une incarnation. C’est sans doute ce qui rend l’homme si proche de nous, ce frère de vie que nous croisons dans la rue sans le savoir et qui porte dans le secret de son être la magie de la création. Petit âme carnivore et merveilleux que l’artiste doit assumer au quotidien et qui dévore ses heures en les multipliant.
Nous découvrons tout cela et bien davantage dans la biographie de Jeannine Burny. Le visage de la plupart des acteurs de cette traversée des jours apparaît au milieu du livre sous forme de photographies. Documents précieux pour l’esprit qui peut ainsi fixer un visage sur un nom. N’oublions pas les poèmes qui comme des fleurs, souligne le récit, lui ajoutant cette foudre de lumière, tel un arc-en-ciel à la voûte des cieux !
Merci Jeannine pour cette biographie, elle fait aimer, découvrir le poète Maurice Carême, mais elle va encore plus loin, plus haut, plus fort, car elle rend accessible à tous les hommes, la poésie, source même des mondes. Un livre incontournable qui symbolise les deux ailes de l’âme.
"La table était à côté du lit. Maurice aimait créer tard dans la nuit. Je me couchais alors, ne pouvant détacher ma vue de son visage. Sa main se posait sur moi. Je sentais ses doigts s’arrondir en trois coussinets où se mêlaient volupté et douceur. L’autre main restée accrochée comme à regret à la feuille où s’ébauchait un poème. Nos regards s’entremêlaient, puis se dénouaient, tentant d’échapper au désir qui les rivait l’un à l’autre. Mais nous résistions jusqu’à ce que s’achève le texte commencé. Soudain, Maurice lançait son crayon sur la table. Comment avons-nous pu attendre ainsi avec cet amour lancinant qui tendait nos corps ? Son regard me déshabillait plus vite que ses doigts pourtant si habiles. La nuit était trop courte. Au matin, je sentais Maurice comme soulevé de lumière. Très vite, sa main se mettait à courir sur le papier qu’elle éclaboussait de mots. Ils se rangeaient en lignes régulières où parfois des blancs laissaient des traces immaculées. Je les savais éphémères et à la merci de l’inspiration qui y reviendrait pour en effacer toute trace."
"Déjà tout le soir bouge.
Tu vas te mettre nue
Sous les losanges rouges,
Nue et si ingénue.Où est le bien, le mal ?
Voici que tout se mêle.
Nous entrouvrons l’enfer
Et entrons dans le ciel.Le présent, le passé
Houlent comme des mers.
Nous passons, enlacés,
Dans une autre lumière.Navire de haut bord,
Pourquoi nous croire encor
Sous ces losanges rouges ?
L’univers entier bouge."